Malaisie
Distance parcourue : 635 kms
Durée : 58 jours (+ 89 off)
Date d'entrée : 2014-04-06
Date de sortie : 2014-08-30
Jour 558 - Kuala Lumpur
Jeudi 10 avril 2014 - 0 kms - Post n° 513
Fanch : Quand on sort de la gare de Kuala Lumpur, notre premier réflexe est de lever la tête… Où sommes nous tombés? Une clôture de grattes-ciel nous encercle et la première étape va consister à sortir de là.
Je charge la carte dans le GPS, direction Biji Biji Initiative, cap plein ouest, à vol d'oiseau nous ne sommes qu'à six kilomètres, mais l'écran du petit appareil indique qu'il va falloir pédaler 12 bornes. Jusqu'ici tout va bien… Et c'est fatigués par quarante heures de transport en commun et une dernière nuit fragile que nous enjambons nos montures pour un premier « ride in KL ». Rapidement, (c'est à dire après avoir trouvé la sortie de la gare ferroviaire) nous plongeons dans un complexe de voies rapides, trop rapides, que nous tentons d'éviter sans y parvenir. L'urbanisation me replonge sur les Highways de Los Angeles. L'asphalte est propre, tout est bien rangé, les grattes-ciel s'élancent vers le ciel, les petites échoppes de bord de route ont disparu, bienvenu dans la capitale malaisienne. Nous tentons d'échapper au danger en empruntant la première sortie, pas de bol, on se retrouve sur une autoroute perpendiculaire, Mister GPS indique une autre sortie qui pourrait éventuellement nous arranger, mais cette dernière n'existe pas et nous roulons maintenant plein Nord. Il fait déjà très chaud, la faim et la fatigue ne nous aide pas à nous concentrer et on commence tout les deux à râler… Euh, on fait quoi? Bah on retourne à la case départ pour manger un bout, se (re)poser, pour ensuite prendre un train et rejoindre Biji Biji.
Le ventre plein et l'esprit un peu plus clair, nous parvenons à joindre les sous-sols de la gare en empruntant plusieurs ascenseurs, traversant quelques galeries commerciales, négociant avec le contrôleur le transport des bécanes à bord des wagons. OK, le métro est là, les portes sont grandes ouvertes, on fonce dans la première voiture dérangeant au passages les usagés du train avec nos montures trop chargées pour ce genre de manœuvre. Mais, il y a un truc qui ne colle pas… Ah oui, effectivement, ce wagon est réservé aux femmes. Et bien, on est là, on reste là, c'est comme ça, on ne va pas faire les difficiles… Enfin bref ce voyage s'éternise il est vraiment temps d'arriver au terminus.
Après avoir traversé la ville en observant notre environnement tout lisse et tout neuf à travers les vitres du métro aérien tout en posant avec une coréenne pour une photo souvenir, nous voici donc (enfin) à Biji Biji. L'heure est à la découverte de l'équipe, de l'espace et de ses objectifs. Biji Biji est tout d'abord une entreprise sociale et solidaire qui oeuvre dans le domaine de « l'Upcycling », autrement dit et en français, le recyclage créatif, ou comment faire du neuf avec de l'ancien. Rashvin, Zoe et Jé se sont installés ici il y a tout juste deux mois, dans cette grande demeure qu'il ont nommé Harmony Hub et ils jonglent maintenant entre leurs activités principales et l'aménagement de la maison. Mais il y a une autre particularité qui les caractérise et qui nous intéresse. Biji Biji fonctionne sur la base du volontariat, c'est à dire que n'importe qui est invité à séjourner ici en échange d'un coup de main (bricolage, ménage…) ou de quelques bonnes idées susceptible de faire évoluer ce lieu plein de potentiel. Le staff, international, est en perpétuelle évolution. En ce moment, mexicain, australien, français, allemand, malais d'origine chinoise ou indienne, hollandais, vivent ensemble et travaillent dans une bonne énergie poussée par une volonté de bien faire affirmée. On va se faire plein de nouveaux potes je pense !
C'est Adrian, notre ami portugais de Jogja, qui après avoir fait un petit tour à Kuala Lumpur nous avait parlé de cette initiative. Une initiative qui nous interpelle tant pour notre recherche sur les objets libres que pour trouver de quoi se poser une quinzaine de jours afin d'y achever le travail (en particulier les montages vidéo) qui traînent depuis trop longtemps dans les sacoches de notre atelier mobile. En échange des quinze jours d'hébergement et pour que Barth puisse se concentrer sur les montages, nous leur proposons une présentation du projet, l'animation d'un workshop d'initiation au hacking électronique et si je trouve un peu de temps, je me pencherai sur un système de visualisation de consommation électrique basé sur arduino pour compléter l'équipement de la maison. Le programme s'annonce… Chargé, mais ce contrat semble satisfaire les deux parties, on va pouvoir se donner à fond.
Nous sommes ici depuis trois jours maintenant, le travail suit son cours et ne nous laisse pas vraiment l'occasion de visiter les environs. Les seules sorties que nous nous autorisons ont pour seul but de faire le plein de calories dans un resto populaire indien situé à quelques mètres de Biji Biji, c'est bon, pas cher et ça change de la cuisine Indonésienne. Mais ces micros excursions nous donnent déjà à voir un bel échantillon de la population de KL. Nous voici dans une ville cosmopolite. Indiens, Chinois, et Malais se côtoient et se respectent les uns les autres, un bon point pour la Malaisie. La plupart des locaux avec qui nous avons conversé expriment d'ailleurs leur fierté vis à vis de ce métissage de couleurs, de religions, de cultures et de gastronomies !.. Ça commence à me plaire.
Ce soir, alors que nous installons le matériel de projection dans l'idée de présenter Geocyclab en bonne et dûe forme à Biji Biji, le courant saute (c'est pas de ma faute!) et le quartier est plongé dans l’obscurité. Les bougies sont posées sur la table, un jam s'improvise naturellement et l'ambiance commence à chauffer… La lumière revient une heure et demie plus tard, il faut se re-concentrer car nous ne sommes plus dedans… Mais, une fois lancés, tout se passe pour le mieux et nous parvenons à capter l'attention de notre public.
Avec ce genre de présentation, nous prenons le temps d'expliquer le sens de ce voyage qui n'est pas forcément limpide pour tout le monde. Finalement, même si chacun l'interprète à sa manière, je pense que toutes les personnes présentes ce soir ont compris ce qu'il y avait derrière notre démarche. Les retours sont positifs et je crois que nous avons dorénavant carte blanche concernant les activités que nous allons proposer durant les jours à venir. Un bon point pour Geocyclab.
Nous avions également une petite réunion avec Anaïs pour faire avancer le dossier financement. Pour le moment, nous attendons toujours quelques réponses et cherchons à débroussailler le terrain des fondations. Peut être qu'un deuxième crowdfunding verra le jour incessamment sous peu. Notre principale difficulté reste de trouver le ratio temps/rentabilité. Désolé d'insister encore là dessus mais ces démarches prennent énormément de temps et d'énergie. Autre sujet sur la table: la diffusion du projet sur les réseaux sociaux et plus généralement sur le web. Là encore, il nous est difficile de nous dégager d'avantage de temps sachant que l'actualisation du site internet rempli déjà un bon tiers de notre planning… La situation de LibLab est aussi à l'ordre du jour car l'association est en standby et il va falloir d'une façon ou d'une autre actualiser son statut.
Enfin bref, beaucoup de questions sont soulevées aujourd'hui, quelques réponses ont vu le jour, mais décidément on se sent un peu seuls face au challenge administratif qui découle de Geocyclab. On est jusqu'à nouvel ordre dans la merde financière, mais ne pouvons et ne voulons pas perdre espoir d'autant que depuis notre arrivée en Asie, il est clair que le duo Geocyclab se porte beaucoup mieux!
Jour 563 - Boulot, session KL
Mardi 15 avril 2014 - 0 kms - Post n° 514
Fanch : La vie de Biji Biji Initiative suit son cours. Par notre présence et en participant aux réunions, nous devenons les témoins d'une jeune aventure Made In Malaisia basée sur le partage du savoir. Cet espace est une véritable fourmilière où idées et projets fusent à toute allure, parfois trop vite pour que l'organisation du travail soit optimale mais l’énergie déployée ici donne lieu à de nombreuses réalisations. Petit à petit l'oiseau fait sont nid. Petit à petit nous constatons l’évolution d'Harmony Hub, la maison en cours de restauration dans laquelle nous vivons depuis quelques jours. Nous continuons notre familiarisation avec la petite équipe internationale. Ça bouge d’ailleurs pas mal de ce côté là, alors que Mathieu (France) fait son apparition, Ines (Allemagne) et Caroline (France) s'en vont continuer leurs périples. Des liens commencent à se tisser par ci par là et notre présence semble apporter une nouvelle couleur à l'ambiance générale du lieu.
Dimanche 13 avril, Geocyclab organise un workshop avec l'aide de Biji Biji. Nous venons de déménager le coin électronique sous le pavillon du jardin. L'objectif du jour est d’apprendre à détourner un amplificateur pour en faire une Crackle Box autrement dit, comment hacker la puce principale de l'amplificateur et comment utiliser les propriétés conductrices des matériaux pour générer du son… Et potentiellement de la musique. La méthode est relativement simple et permet aux débutants de comprendre quelques bases d’électronique. Elle m'avait été enseignée par El maestro Tuni Panea quelques semaines avant le début du voyage lors de l’édition 2012 du SummerLab Nantais. Probablement par manque de communication, seul Navin nous rend visite pour son tout premier « electronic hack ». Mais pas l'ombre d'une déception pour ma part devant le peu de candidats qui ne se bousculent pas devant le portillon car c'est pour pour moi aussi une première, une personne à la fois, c'est bien. Trois heures plus tard, ça sonne et Navin repart avec un instrument de musique. Dans la foulée, nous décidons de retenter l’expérience dimanche prochain, avec cette fois-ci un peu plus de communication sur l’événement.
Même si nous ne nous en rendons pas totalement compte, le travail avance. Barth est toujours sur le banc de montage à avaler plusieurs dizaines d'heures de rush. Je le surprends aussi parfois à fignoler le site internet, probablement pour le préparer à recevoir la carte interactive Open Street Map. Pour le moment, seul le Checkpoint 009 a été mis en ligne, concernant le reste des videos, je m'attend à voir tout sortir d'un coup d'ici la fin du séjour à Kuala Lumpur. De mon cote, mes attentes concernant cet épisode chez Biji Biji Initiative se confirment et je profite à fond de l'atelier d’électronique pour me pencher sur quelques exercices qui traînent dans ma caboche depuis un bon moment déjà. En réalité, plusieurs expériences sont en cours, celle des plantes qui sifflent est bien-sûr en work in progress et un synthétiseur arduino devrait voir le jour d'ici peu. Je bosse aussi sur un amplificateur 25W portable dont l'objectif sera de finaliser notre « ultramobil sound system » (chantier en cours depuis Mexico), à cela s'ajoute une expérience plutôt positive avec un montage électronique destiné à contrôler plusieurs solénoïdes avec Arduino et Pure Data. Et le petit plus, histoire de laisser une trace de notre passage à Biji Biji Initiative, je planche actuellement sur un système de mesure de production/consommation d’énergie électrique (Watt, Ampère, Volt) avec un affichage des données sur écran LCD. Je vais essayer d’écrire prochainement un article spécial pour parler plus en détail de tout ces petites machines inintéressantes.
Nous sommes, vous l'aurez compris, en pleine période de boulot, suivant notre propre rythme, travaillant le jour, le soir ou la nuit, chacun d'entre nous sait ce qu'il a faire et le fait de son coté. Je ressens une vague de motivation déferler dans les locaux de Biji Biji et nous en profitons allègrement. Avec Barth, on ne fait que se croiser mais nous nous retrouvons presque chaque soir, au resto Indien devenu notre cantine officiel pour faire le point de la journée et pour discuter du programme à venir. Ces réunions au gout masala sont aussi l'occasion d’échanger nos sensations concernant l’évolution de Geocyclab. J'ai personnellement l'impression (je préfère parler en mon nom même si je pense que mon compagnon de route ressent quelque chose de similaire) que le voyage et l'atelier nomade nous absorbe petit à petit, que Geocyclab s'impose à nous, non plus comme un simple projet mais comme un véritable mode de vie, temporaire certes mais intense, réel et profondément transformateur.
Jour 568 - KL Round 3
Dimanche 20 avril 2014 - 0 kms - Post n° 515
Fanch : Hind est au balcon du troisième, elle charge les photos du dernier événement sur la page Facebook de Biji Biji. Nick l'australien est assis dehors, crayon papier en main, le regard sérieux, il planche sur un nouveau modèle de composteur, Jé est en vadrouille pour choper un moteur DC qu'il va modifier en grosse dynamo pour créer un générateur de courant à propulsion humaine. Zoé et Mathieu sont dans l'espace commun du premier étage, l'une est sur le google-doc de Biji Biji, l'autre, un laptop sur les genoux, pose des chiffres dans les cases d'un tableur. Panjab se réveille, il a encore veillé tard hier soir (nous en sommes les seuls témoins) pour finir une de ses lampes de chevet (il est dans sa période luminaires). Maurice, l'étudiant allemand en électro-mécanique est déjà parti pour l’université, quant à Ruben, (Mexique) Ju et William, co-fondateurs de « Taboo entreprise » (organisation d’événements culturels), ils se préparent pour une journée boulot. Abdoula tisse un abat-jour en capsules de canettes mais a encore zappé la litière du chat. Sultan from Pakistan, derrière la machine à coudre, siffle les mélodies de son pays, Rachvi quant à lui, ne devrait pas traîner, il a du neuf concernant notre intervention prochaine dans une succursale du ministère de l'innovation (on ne sait pas du tout ce qui nous attend). Ashly, l'artiste peintre, tente toujours de trouver l'inspiration pour enfin commencer sa « résidence » à Biji Biji et Laela qui vient tout juste de revenir de dix jours de retraite silencieuse, nettoie un peu la cuisine en entonnant avec talent quelques mélodies jazzy… Il est 11h30, un matin.
Energie, idées, recyclage, bonne humeur, partage… Même si Biji Biji est une entreprise, tous les ingrédients pour une bonne recette son réunis. Et nous sommes gourmands… Jusqu'à présent, rien que le fait d'entendre le mot « business » dans ce genre de lieu me procurait quelques démangeaisons cérébrales. Mais Biji Biji (qui veut dire graine en malais) propose à ses membres ou volontaires un mode de production original et créatif, pour produire et diffuser un message engagé. Ne traînons pas, tout le monde est la, il est temps de passer en mode interview. Neuf, c'est le nombre de témoignages que nous avons collecté aujourd'hui, un bon score. Ce type d'entretien réalisé dans ces conditions (après avoir côtoyé nos interlocuteurs une dizaine de jours) est pour nous un moment privilégié. C'est un peu le moment où toutes les discussions passionnantes des dix derniers jours ressortent en ultra condensées mais c'est aussi l'occasion d'en apprendre davantage sur chacune des personnes interrogées. Bon, neuf c'est bien mais c'est fatiguant et après ça, je dois vous avouer que je ne suis plus apte à faire quoi que ce soit… Migraine.
Notre rythme de travail est entrecoupé par cette fameuse présentation au « Teh Tarik Talk », une espèce de talk show organisé régulièrement par le ministère des sciences, technologies et innovations. Azam est notre chauffeur, Hind est avec nous, elle va probablement nous aider si jamais nous avons besoin de traduction, on roule donc aux portes de Kuala Lumpur, au studio de Teh Tarik Talk. En arrivant à destination, nous sommes surpris de voir, suspendues dans l'espace, plusieurs bâches plastiques imprimées de nos têtes respectives… Oups… à l’intérieur, c'est la fête, une nana chante de la pop locale sur le podium qui nous sera réservé par la suite. On est pour le moins accueillis comme des héros un peu fous sur les bords, un peu plus que d'habitude disons, mais face à cette situation l'impression est réciproque. Il faut se mettre à danser maintenant! Bon, mise à part l'ambiance sympa mais un peu superficielle, tout c'est bien déroulé avec des chocolats et quelques ringits en plus que d'habitude… Un grand merci à Biji Biji d'avoir été le catalyseur de cette étrange mais néanmoins sympathique et intéressante expérience.
Dimanche, c'est workshop et rebelote. Il n'y a personne ce matin mais cet après-midi, Shiva, le guitariste héro et quelques membres d'Harmony Hub se montrent volontaires pour s'essayer à l’électronique… Le sujet d'étude est le même que la semaine dernière, on est toujours sur la Crackle box.
Niveau boulot, la locomotive est lancée et on profite de l'inertie. On a eut pas mal de retours suite au dernier checkpoint et avec cela, plusieurs contacts en Asie du Sud Est (merci) que nous sommes en train de d’étudier. Barth monte des images, je monte des circuits imprimés et on mange toujours au même resto. On arrive tout de même a s'accorder quelques poses pour profiter de la bonne ambiance générale d'Harmony Hub et participons aux réunions, officielles ou improvisées, c'est toujours intéressant de prendre part à ces rassemblements et par là même, de comprendre où se localise la source d’énergie de Biji Biji…
Ah oui, on devait partir demain lundi 21 avril, mais on a encore du pain sur la planche… du coup, et bah on ne sait pas encore… rendez-vous dans quelques jours pour la suite des événements!
Jour 574 - Le grand tournant
Samedi 26 avril 2014 - 0 kms - Post n° 516
Barth : Déjà trois semaines que nous nous sédentarisons au sein de la communauté de Biji Biji, et je décide enfin à sortir un peu la tête de l'eau pour vous faire part de mes dernières réflexions et avancées. L'ordinateur a donc remplacé le vélo, les jours et les nuits défilent au rythme des pluies tropicales qui viennent rincer l'air de Kuala Lumpur une fois par jour. A n'importe quelle heure du jour ou de la nuit, il me suffit de traverser la rue et de m'asseoir à une des tables en plastique du restaurant indien l'Uma Rani, un paradis culinaire, visuel et sonore, où je me suis découvert une nouvelle addiction pour les rotis (genre de nans indiens à la mode malaisienne) pour le reste, il y a tant de gens et de projets à rencontrer ici que je ne ressens pas encore le besoin d'aller voir plus loin dans la ville…
Après notre arrêt déjà long à Jakarta, nous abordons donc l'Asie par les grandes villes. Kuala Lumpur est une impressionnante ville, où la luxueuse modernité semble avoir poussé au beau milieu de la jungle. Notre séjour à Harmony Hub nous isole un peu dans une bulle protectrice mais cette lente et progressive immersion dans la vie du quartier n'en finit pas de me griser. Je suis en voyage, mais je ne me sens pas obligé d'aller faire la queue dans tous les sites touristiques qui nous attendent pourtant. Quelle liberté ! Les rencontres quotidiennes que provoque l'attraction de cette grande maison et la simple contemplation de la mixité ethnique de la population locale en sirotant un tchaï à la terrasse de l'Uma Rani, suffisent à combler ma curiosité pour le moment…
Bon, et qu'est ce qui se passe dans l'ordinateur me direz-vous..? Essentiellement du montage vidéo à propos des Objets Libres. Le bilan est positif, je n'ai pas perdu trop de temps à cause de la langue anglaise, et les interviews que nous faisons sont de plus en plus ciblées, se répondant bien les unes aux autres, je commence à me projeter un peu dans le montage que nous ferons au retour pour synthétiser cette enquête. A l'heure qu'il est, il ne me reste qu'à sous-titrer tout ça en français pour avoir enfin le plaisir de vous faire découvrir un peu plus en détails nos rencontres des derniers mois. Il y a aussi bien sûr une foule d'autres choses à faire, plus ou moins quotidiennement pour Geocyclab ou pour Biji Biji, qui font que les véritables pauses sont rares dans ce rush précédant les vacances. Mais on ne pouvais pas rêver meilleur endroit pour travailler, soutenus par l'élan de l'énergie de toute la bande, et regonflés par quelques jam sessions nocturnes ou autres couscous party !
Nous avions finit par reporter notre départ à demain, en gardant tout juste le temps de rouler jusque Penang pour y passer quelques jours, mais la nouvelle que nous venons d'apprendre chamboule tous nos plans et précipite un peu la mise en panne de Geocyclab. La bourse Declic'Jeunes sur laquelle nous comptions pas mal pour souffler quelques mois, vient de nous passer sous le nez. La concurrence était importante, la chance ne nous a pas sourit, nous voici donc au pied du mur…
Il va falloir trouver des sous, et vite, pour mettre le cap à l'ouest dans quelques mois. Nous vous remercions toutes et tous pour vos dons, soutiens, contacts ou conseils qui ont afflué en réponses à la publication de notre dernier CheckPoint. Tout cela nous aide à ne pas nous décourager et à persévérer dans nos recherches. Pour le moment, nous n'avons pas de solution miracle, mais c'est sans compter sur l'incroyable réactivité de toute l'équipe de Biji Biji qui vient de nous proposer une rémunération en échange de la conception d'installations artistiques interactives sur un festival. Des installations avec Arduino, du matériel, des gens pour nous aider techniquement et au final une super visibilité pour Geocyclab ! Depuis notre départ, nous sommes à l'affut de ce genre de proposition et il faut attendre de ne plus avoir le choix pour que l'occasion se présente ! Pas d'hésitation donc, nous jetons l'ancre ici jusque fin mai sans doute..
Pour ma part je vais tout de même retrouver Anaïs à Bangkok le 10 mai, sans vraiment abandonner Fanch qui sera rejoint par Gurvan quelques jours plus tard. Je mets donc les bouchées doubles pour cette dernière quinzaine de jours de boulot avant les vacances, à la fois pour finir le boulot de Geocyclab, ouvrir un maximum de portes en vue de trouver d'autres sources de financement et participer tant que je peux aux premiers jets du chantier qui s'ouvre avec Biji Biji.
Aujourd'hui, nous avons attendu que la pluie cesse et suivit Ashly dans le centre de KL pour y rencontrer son contact à Penang en vue d'y présenter Geocyclab dans une semaine.. Mais ça parait trop compliqué.. Ce n'est pas le moment ni pour nous, ni pour eux, on laisse tomber. En sortant du petit bar branché planqué au pied des grattes-ciel de KL, nous croisons Obama, dont le cortège sécurisé file sur les avenues bloquées, mitraillé par les smartphones de centaines de badauds.. Pas le temps de lui demander un petit coup de pouce pour notre projet, mais on va prendre ça pour un bon signe.. Yes we can !
Jour 580 - Mise en panne
Vendredi 2 mai 2014 - 0 kms - Post n° 517
Barth : Le manoir de Biji Biji est à présent entré dans une phase d'effervescence absolument incroyable ! Cela fait une bonne semaine que ça dure, le chantier de préparation du festival tourne maintenant à plein régime. Les palettes de bois, les pneus et autres barils d'essence ou bouteilles plastiques envahissent la cour, attendant d'être découpés, poncés, assemblés, peints pour se transformer en bancs, tables et mobiliers divers. Fanch est plongé dans ses tests Arduino pour valider la partie électronique des différentes installations que nous voulons réaliser sur chacun des quatre sites mis en scène par Biji Biji sur le festival.
En plus de quelques coups de mains extérieurs, toute la tribu d'Harmony Hub est mobilisée, et ça avance à une vitesse impressionnante. C'est la première fois que « Taboo entreprise », la boîte de William et Juliana, coopère sur un aussi gros projet avec Biji Biji, et la greffe improvisée de Geocyclab dans cette aventure semble être une coïncidence qui fait le bonheur de tous. Recyclage créatif, événementiel, création artistique et technologies libres sont les ingrédients de la recette miracle qui boost toutes les énergies en présence ici ! Je réalise à quel point notre expérience de la première phase de Geocyclab, et particulièrement notre longue pose forcée à Mexico, nous a appris à ne pas paniquer en cas de grosse alerte, et a développer une sorte de réflexe d'adaptation qui nous a entraîné vers cette incroyable opportunité. Car nous sommes toujours en alerte rouge côté finances…
De mon côté, je tente tant bien que mal de contribuer à l'effort général pour le festival, sans trop pouvoir prendre de responsabilités car je vais quitter le navire en pleine tempête bientôt. Cela me fait un bon prétexte pour rester concentré sur Geocyclab. En plus de l'argent que nous toucherons grâce à Biji Biji, nous allons relancer une opération de crowdfunding, tenter de trouver le temps de demander une subvention et de postuler au prix d'une fondation, et nous venons de tenter notre chance sur un concours en ligne financé par une marque de fringues.. Tous les coups sont permis ! Grâce à l'aide d'Anaïs, les choses avancent pas mal sur ce point aussi, et nous avons aussi l'espoir de nous faire rembourser notre ancien ordinateur toujours sous garantie, ce qui pourrait mettre un peu de beurre dans les nouilles chinoises.
Les futures vacances s'annoncent donc un peu entrecoupées de mini-urgences administratives pour maintenir l'ensemble à petit feu, en attendant la reprise en juillet… Mais le temps est donc venu de fermer les portes de notre atelier pour congés, pour la première fois depuis notre départ.
Fin des publications donc, jusqu'à nouvel ordre, pour le grand malheur de nos plus fidèles lecteurs, mais aussi pour satisfaire le vœu de celles et ceux qui nous appellent à prendre des vacances depuis si longtemps. Pour ne pas que ce silence soit trop pesant tout de même, je suis sur le point de programmer la mise en ligne de nos derniers Objets Libres, à découvrir donc très bientôt durant notre absence.
Ils nous reste à vous remercier encore pour tous vos soutiens de ces derniers jours, Geocyclab va bientôt repartir grâce à vos efforts rassemblés ! A vite !
Jour 581 - Reprise d'antenne à KL
Jeudi 31 juillet 2014 - 0 kms - Post n° 518
Barth : Je laisse la plume à Fanch pour cet article de reprise, et vous propose une sélection de photos du festival Belia à Putrajaya qui fut l’événement phare de nos quatre mois de pause.. Hop ! Je retourne à mon montage vidéo…
Fanch : Le dernier article publié sur le site date du vendredi 2 mai 2014. Trois mois ont passé sans donner de nouvelle mais nous avions largement besoin d'une pause. Dans un souci de transparence (étant donné que ce terme reviens à la mode) voilà un petit résumé de ces « vacances » qui furent en ce qui me concerne, loin de ce que j'attendais. Aller, let's go…
Nous venons de recevoir un courrier de la fondation de France qui nous remercie pour notre candidature à la bourse Déclic Jeune, mais le projet Geocyclab est recalé. J’espérais beaucoup de cette bourse et j'avoue tomber des nues en apprenant la sentence, merde… Il va falloir trouver une autre solution pour se refaire financièrement. Mais après ce coup dur qui n'aura pas duré si longtemps vient le réconfort. L'équipe de Biji Biji est en attente d'une réponse concernant un gros chantier, si la réponse est positive, il seront probablement en mesure de m'embaucher.
Well done… Alors que Barth est sur le départ pour la Thaïlande où il va retrouver Anaïs, le programme du mois de mai se dessine. Je m'engage à réaliser une installation interactive pour la deuxième édition du « Belia Festival » à Kuala Lumpur et pour la première fois depuis le début du voyage je ne bosserai pas gratuitement. Une formidable équipe (que je ne suis pas prêt d'oublier) bosse à mes coté durant trois grosses et intensives semaines jusqu'à l'ouverture du festival. De mon coté, je me suis attaqué à un gros morceau. L'objectif est de réaliser huit plantes interactives qui chantent quand on les caresse. Pour ce faire (sans rentrer dans les détails techniques) j'utilise une technologie conçu par le « Disney Research lab » (ils se mettent aussi à l'Open source) et adapté pour Arduino par DZL. Le dispositif matériel se compose de plantes, d'un Arduino Mega et d'une batterie de capteurs capacitifs « home made ». Le logiciel Pure data prend en charge les informations numériques pour les transformer en synthèse sonore. Pour les curieux, vous pouvez retrouver plus d'infos et en comprendre davantage avec le tutoriel de Mads Hobye.
Gurvan que je devais rejoindre en Thaïlande, arrive finalement à Kuala Lumpur, juste à temps pour me filer un bon coup de main alors que le rythme de travail s’accélère à l’approche du festival. Barth et Anaïs nous rejoignent bientôt et sont embauchés en tant que photographes officiels de Biji Biji Initiative à l'occasion du festival. Ok, tout le monde est là ? C'est parti pour la dernière ligne droite. L'installation nous donne pas mal de fil à retordre, il faut faire face à de nouveaux soucis techniques que les conditions d'exposition révèlent au grand jour. Puis enfin, ça fonctionne, même si j'avoue ne pas être satisfait du résultat qui selon moi n'est pas propre et bien trop expérimental pour ce genre d’événement, mais ça fonctionne et les autres membre de l'équipe semblent contents, alors je ne vais pas trop l'ouvrir.
Dimanche 25 mai, dernier jour du festival, un événement inattendu survient alors que je ne suis qu'à quelques jours de mes vacances… Mon sac à dos disparaît alors que je faisais une dernière fois les réglages de l’installation. Bilan des courses : passeport, carte d'identité, permis de conduire (certes pas très utile, mais sait-on jamais…), microphones, appareil photo, couteau, chargeur de piles et lampe frontale manquent à l'appel. Et là, soyons clairs, ça fait bien chier ! A ce jour, près de trois mois après cet événement, j'ai encore peine à y croire.
Outre le matériel, je me retrouve bloqué en Malaisie pour une durée indéterminée le temps de récupérer un nouveau passeport. Pas de Laos ou de Cambodge pour moi ce coup-ci et je regarde Barth, Anaïs et Gurvan préparer leurs bagages pour s'en aller plus au nord. J'avoue que j'ai un peu le blues durant les quelques jours qui suivront leurs départs.
Si je ne suis pas libre de sortir de Malaisie, il m'est néanmoins possible d'y circuler, alors quelques jours après le festival (après avoir soufflé un bon coup), j'ai donc plié bagages et nous sommes partis, Panjang, Navin, Mat et moi-même, à la conquête de la province de Terrenganu située au nord Est du pays. Pour faire les présentations rapidement, Matthieu le chti, est l'un des fondateurs de Biji Biji, ingénieur de formation, il m'a bien aidé sur les histoires de débogage Arduino. Navin, citadin assumé, traîne ses guêtres dans l'atelier d’électronique de Biji Biji depuis que nous avions organisé le workshop « Crackle Box ». Lui aussi m'a filé un bon coup de main, entre soudures et allers-retours à Jalan Pasar (le quartier ou se concentrent les fournisseurs d’électronique) et c'est sûrement la personne avec qui j'ai passé le plus de temps. Panjang est en quelque sorte le concierge de la maison Biji-Biji, un grand, mince et mystérieux bonhomme mais néanmoins sympathique… Que nous avons suivi jusqu'à sa demeure familiale de Terrenganu… Une semaine de vacances à se la couler douce. J'avais d’ailleurs prévenu mes compagnons avant de prendre la route que je ne prendrai pas de décision concernant le déroulement du programme, je suis le mouvement !!!
Après ce bol d'air sur la côte est Malaisienne et sur l'île de Perhentian Kecil, retour à la réalité. Me revoilà dans l'atelier d’électronique, faisant face à ce petit problème de GPS disparu avec ce sac à dos dérobé. Et oui, vous l'aurez sûrement compris, ce petit appareil est essentiel pour Geocyclab, et il faut trouver une solution de remplacement. Deux options s'offre à nous. En racheter un tout neuf, solution rapide, simple mais onéreuse et sans challenge particulier… Ou en fabriquer un basé sur Arduino. Le challenge est bien réel mais ça semble réalisable… J'hésite encore, j'envoie un mail à Barth pour lui demander ce qu'il en pense… Il me donne son feu vert ! Ok, c'est parti.
Je vais essayer d'écrire prochainement un article un peu plus technique sur le sujet mais laissez-moi vous décrire un peu de quoi il s'agit. Ce n'est pas un GPS pour s'orienter avec écran et une voix de synthèse qui d'un ton sexy vous indique de rester sur votre droit sur les trois prochains kilomètres, mais un traceur destiné à enregistrer régulièrement différentes données tout au long de notre route (date, heure, latitude, longitude, altitude, nombre de satellites…). Je lui ai associé quatre boutons qui auront pour rôle de poser des marqueurs ou des repères (Objet du jour, Interview, Haiku, Création artistique). Son agencement est pensé pour y connecter n'importe quel type de capteur (ou presque) dont les données seront elles aussi enregistrées sur la carte mémoire de l'appareil. J'ai d'ors et déjà connecté un capteur de température (il fait environ 32°C dans la pièce où je travaille, pour info…), et j'aimerais dans un futur proche, y ajouter un capteur d'hygrométrie, et d'autres pourquoi pas. Le petit plus c'est que normalement ce traceur GPS sera alimenté par un couple de batteries de téléphone portable directement connecté à un petit panneau solaire et donc complètement autonome (je bosse en ce moment pour que le GPS switch en mode veille quand on ne se déplace pas, pour économiser de l’énergie durant la nuit par exemple). Le challenge est presque relevé, encore un peu de boulot à avaler avec l'appui technique de Matthieu. J'aimerais à terme en faire un réel outil de géolocalisation destiné aux artistes nomades et aux chercheurs amoureux du terrain. (Rien ne sert de préciser que j'ai personnellement pas mal de projets qui vont dans ce sens).
Enfin bref, les données qui seront collectées serviront à alimenter notre base de données et par la même, à compléter jours après jours la nouvelle carte interactive de Geocyclab sur laquelle ont travaillé d'arrache pied J.B. Dodeur et Barth Péron. Merci les gars, vous avez assuré !!! Bye bye Google map, bonjour Open Street Map, et en plus, c'est classe ! Je laisse la parole à Barth qui en causera d'avantage… J'ai juste envie de rajouter que suite à la réalisation de la carte interactive sous Open Street Map, puis du traceur GPS Arduino, nous faisons un pas de plus dans le monde du libre avec un système de géolocalisation (matériel + logiciel) complètement open source. Ces vacances auront finalement été productives.
Et c'est peu dire, puisque nous sommes une nouvelle fois invités à exhiber les plantes sonores, lors du « Cool A Lumpur Festival » (notez ce fabuleux jeu de mot), événement qui consiste à présenter les trucs cool de Kuala Lumpur. On est cool, et oui ! Enfin bref pas si cool puisque je doit interrompre mon GPS pour me remettre à plancher sur le projet Singing Plants. Je travaille une semaine sur trois plantes, mais en mettant davantage l’accent sur l'interaction sonore. C'est le grand jour. 1, 2, 3, ça marche, et bien mieux que la première version !!! J'ai bien fait de soigner un peu le design sonore, les plantes répondent plus subtilement aux stimulis du spectateur/acteur, mais aussi de façon plus distinctive, ce qui procure à chacun des plants un caractère singulier. Done !
Après un mois d'attente, je viens de récupérer mon passeport. Sachant qu'il est grand temps de quitter le pays pour un renouvellement de mon visa malais, le plan A était qu'à partir de ce jour j'irais rejoindre soit mes potes au Cambodge, soit Gurvan au Laos. Mais étant donné le prix des billets d'avion et la fin des vacances qui approche à grand pas, le plan B se passera différemment, je préfère partir un peu moins loin pour un peu moins cher, chez Jang, le « Jungle Boy » de Bornéo. (Pour info : Bornéo est une île située entre les Philippines et l'Indonésie, légèrement plus grande que la France et divisée en 3 parties, la Malaisie, l’Indonésie et le Brunei qui se partage ce territoire.) (Pour info : Jang à la cinquantaine passée que son physique et son énergie ne dévoile pas. Je l'ai rencontré un peu plus tôt, à Harmony Hub où nous avions cohabité un bon mois. Il est artiste et adepte de la théorie du complot, de cinéma d'art et d'essai, passionné par la société et de religions. Il va sans dire que suite à plusieurs heures de conversation autour de nos sujets de discussions favoris, nous avions largement sympathisé.)
Il m'accueille à Bornéo à bras ouverts, je ne l'ai pas vu depuis trois semaines et c'est déjà si bon de le retrouver… Au programme, un aller-retour en Indonésie pour un visa run, quelques flâneries sur les plages de pêcheurs situées aux alentours de Kuching, un petit tour dans le majestueux parc de Bako (l'une des plus vieilles forêts primaires, protégée, mais personne ne sait pour combien de temps encore), et une expédition dans un des petits bouts de jungle que l'industrie de l'huile de palme n'a pas encore cramé. J’espérais y rencontrer quelques cousins orangs-goutans, mais non, c'est pas la saison parait-il… Jang a d’ailleurs l'air de penser qu'il n'y aura plus de saison…
A ce propos, je n'ai pas l'intention d’écrire un article sur la déforestation en Asie du Sud Est, mais à savoir le nombre d'espèces endémiques qu'abrite cet écosystème incroyable, croyez moi, c'est un désastre écologique, un trésor pillé jour après jour… Et je ne parle pas des tribus indigènes qui disparaissent les unes après les autres ou des conditions de vie déplorables des locaux qui travaillent dans les plantations. Visitez ce lien pour en savoir un peu plus, ça coûte rien de s'informer même si ce n'est pas drôle, ça fait un peu réfléchir…
Jang m'a montré de belles choses, on a goûté tout un tas de petits plats locaux super sympas certes… Mais tout en gardant son large sourire, il m'a clairement ouvert les yeux sur certaines tristes réalités sociétales imposées par un gouvernement bipolaire qui d'un coté tente d'appliquer la constitution malaise et de l'autre la charia. Les musulmans sont soumis aux lois islamiques mais la charia à aussi un impact sur les non-musulmans qui donne à réfléchir. Et au delà de cela, la discrimination (même s'il elle n'est pas flagrante) génère inégalités dont les premières victimes sont les « non-malais d'origine » ce qui représente quasiment 40% de la population. Ses parents sont chinois, lui est malais mais son visage trahit ses origines et de ce fait, il n’accédera jamais aux privilèges accordés au Malais d'origine, il ne pourra pas par exemple être propriétaire d'un terrain ou monter une entreprise. Il n'est pas non plus tout à fait chinois (il n'est d’ailleurs jamais aller en Chine) et se retrouve coincé entre deux identités et deux cultures.
Et voilà, les vacances se terminent, je quitte Bornéo pour rejoindre Kuala Lumpur, je pourrais d’ailleurs presque dire pour rentrer à la maison. Aux dernières nouvelles, Gurvan à dégoté une veille bécane avec qui il va roder un peu de temps en Asie du Sud Est, Anaïs est rentrée en France et Barth est de nouveau devant l'ordi. Nous avons maintenant pas mal de boulot à abattre pour remettre Geocyclab en place avant de quitter Kuala Lumpur et nous remettre à l'oeuvre. Y'a du boulot c'est sûr, mais ça va être trop bon !
Jour 588 - Sur le départ...
Jeudi 7 août 2014 - 0 kms - Post n° 519
Barth : Bientôt un mois que j'ai retrouvé Fanch et une bonne partie de l'équipe de Biji-Biji à Kuala Lumpur, après mes deux mois de vacances avec Anaïs. Nous avons exploré le Cambodge et quelques coins du sud de la Thaïlande, entre visites de temples, de sites naturels, ballades à vélo sur les rives du Mékong, baignades, coconuts et nightmarkets… Je ne m'étend pas plus sur le récit de ces vacances, car contrairement à Fanch qui n'a pas pu bouger suite à la perte de son passeport, j'ai vraiment oublié Geocyclab pendant quelques temps et je dois dire que ça m'a fait le plus grand bien.
Ces quelques images en diront un peu plus tout de même :
Il y a juste eu une parenthèse de dix jours pour prendre part au Belia festival et passer un peu de temps avec Fanch et Gurvan, et la BijiBiji's team. Et ce ne fut pas de tout repos ! Le festival se tenait à Putrajaya, une ville administrative démesurée construite il y a à peine dix ans au beau milieu de la jungle à une heure de route de Kuala Lumpur. Un peu comme EuroDisney et Paris, sauf que là c'est pas Mickey mais le gouvernement malaisien qui reçoit et qui organise. L'espace est immense, les axes de circulations saturés, et l'ambiance générale est un peu trop « corporate » pour un événement qui se dit festival de la jeunesse.. La présence de notre équipe internationale ne se fond pas vraiment dans le décor, et c'est tant mieux, tant que ça apporte de la visibilité à Biji Biji ! L'organisation matérielle est compliquée, la fatigue des semaines passées à tout préparer avant est palpable, et la dimension de l’événement est un peu disproportionnée, mais malgré ça, l'esprit d'équipe a plus que bien fonctionné et l'opération est un succès.
Un mois donc que notre atelier se relance, en duo du moins car Fanch n'a pas vraiment cesser de bricoler durant mon absence, mais nous avons décidé d'attendre le jour du départ pour relancer également les publications sur le site. Le retour au boulot est assez intense car les tâches ne manquent pas..
Tout d'abord, j'ai le plaisir de vous annoncer officiellement la mise en ligne d'une première version de notre carte interactive Open Street Map, réalisée par notre nouveau partenaire es cartographie : Jean-Baptiste Dodeur, le frère de Fanch. Merci encore JB ! Cette carte présente pour le moment un accès géolocalisé à toutes nos productions (Carnet de bord, CheckPoint, Haïkus, Objets libres, Ex-Situ…) Il nous faut encore trouver un moyen d'afficher notre itinéraire prévisionnel et les déplacements en avion ou en bus, mais le nuage de points visible actuellement visualise déjà pas mal la piste de fourmis que Geocyclab a tracé de Quimper à Kuala Lumpur. Une bonne chose de faite donc, mais il nous faut aussi prendre le temps d'organiser la suite…
Je laisse Fanch fignoler notre nouveau GPS « made in Geocyclab » et plancher sur les nombreux détails administratifs que nous devons anticiper (visas pour la Birmanie et l'Inde, renseignements sur le passage des frontières terrestres pas toujours simple apparemment…). Et je me concentre de mon côté sur la nouvelle campagne de financement participatif que nous allons lancer. En soit, rien de bien sorcier, c'est le même principe qu'avec Octopousse avant notre départ (Octopousse ayant été avalé par Ulule, nous avons suivi ses traces..). Il suffit de rafraîchir nos textes de présentation, les traduire en anglais, sélectionner quelques images et, après mûre réflexion, prendre le temps de réaliser une petite vidéo pour présenter Geocyclab de manière un peu plus vivante qu'un dossier PDF. L'exercice m'inspire, je me plonge donc dans nos anciennes productions pour en extraire l'essence de Geocyclab concentrée en quelques minutes ! Je suis heureux (malgré la surcharge de temps) d'être arrivé à faire quelque-chose de propre avec Kdenlive (éditeur de vidéo Open Source) que je continu de découvrir et de prendre en main. Le résultat sera à découvrir, et à partager s'il vous plaît :) …très très bientôt.
Après avoir repoussé plusieurs fois notre départ, nous allons finalement reprendre la route dans quelques jours, le temps de fignoler les bagages, de résoudre quelques points matériels et surtout d'avoir le temps de faire nos aux-revoir à chacun de nos colocataires, opération qui s'annonce haute en émotions… Comme à Mexico, le temps que nous avons finalement passé à Kuala Lumpur ajoute de nombreux noms à notre liste d'amis qu'il va être dur de quitter. Cette longue période sédentaire de cinq mois si l'on y ajoute Jakarta était nécessaire pour lever un peu les yeux du guidon, prendre du recul sur le projet lui-même, et aborder avec un peu plus de clairvoyance la complexe équation qui lie la mobilité, la productivité, le financement et la durée prévue de Geocyclab.
Geocyclab est donc toujours à l'antenne, « still alive » comme on dirait ici, et malgré l'ambiance « lost in translation » (du superbe film de Sophia Copolla) dans laquelle nous flottons un peu Fanch et moi, nous avons hâte de reprendre la route. Nous allons démarrer en douceur avec une étape de 400 kms environ jusque l'île de Penang où nous prévoyons de séjourner une semaine, pour finir la petite vidéo de demo, tourner un Checkpoint dans la foulée, et sans doute lancer le top départ de notre récolte de dons sur Ulule. Nous aurons l'occasion de vous en reparler, mais cette collecte est une des dernières cordes que nous avons à notre arc pour tenter de financer Geocyclab rapidement, nous comptons donc beaucoup dessus et espérons que le réseau de nos proches et de nos rencontres sur la route va amplifier sa diffusion. Ensuite nous entrerons en Thaïlande où le temps nous sera compté (un mois de visa pour rejoindre le poste de frontière birman à 1400 kms, tout en passant quelques jours à Bangkok pour obtenir notre visa indien impossible à faire à Kuala Lumpur.
Mais on vous redonne des nouvelles d'ici là bien sûr, on the road again !
Jour 591 - Départ de Kuala Lumpur
Dimanche 10 août 2014 - 65 kms - Post n° 520
Fanch : Avec le départ qui approche c'est l'heure du bilan qui sonne et en se retournant vers ces dernières semaines, je remarque que malgré ces « vacances » Geocyclab n'a pas cessé d'évoluer.
Quitte à me répéter avec les deux derniers articles, je m'accorde une petite liste des événements qui ont marqué Geocyclab depuis le début de notre séjour chez Biji Biji Initiative. Les listes, j'aime bien, c'est clair, rapide à lire, ça en dit beaucoup et c'est pas chiant à rédiger :
- Animation du Work Shop Crackle Box ou comment hacker un petit amplificateur pour en faire un instrument de musique.
- Présentation du projet Geocyclab aux membres de Biji Biji.
- Interview des membre de Biji Biji Initiative.
- La Fondation de France rejette notre demande de bourse.
- Barth part en vacance avec Anaïs.
- Réalisation d'une installation sonore avec Biji Biji pour le « Belia festival » à Kuala Lumpur.
- Vol de mon sac à dos, mon passeport et pas mal de matériel qui disparaît.
- Deuxième installation pour le festival Coola Lumpur.
- Réalisation d'un traceur GPS basé sur Arduino.
- Édition et mise en ligne d'une carte interactive Open Street Map.
- Réalisation d'un « trailer » et préparation d'un nouveau crowfounding que vous découvrirez bientôt.
- Bonus: Beaucoup d'expérimentation Arduino
- Bonus #2: De nouveaux potes, de nouveaux contacts et des Jam sessions à n'en plus finir.
Bon, que se passe-t-il quand il faut dire adieu à tout une ribambelle de joyeux lurons avec qui nous avons partagé quatre mois de vie commune, quelques fiestas, du boulot, un peu de stress (mais pas trop), des bonnes bouffes, mais par dessus tout, quatre mois de joie et de bonne humeur. Non, on ne pleure pas mais on ressent quelque chose d'intense qui grandit dans l'estomac puis remonte dans la cage thoracique et fini par titiller les sinus et les glandes lacrymales. Stop, non on ne pleure pas j'ai dis, mais franchement, je n'en suis pas loin. Alors oui, c'est avec plaisir et émotion que nous remercions toute l'équipe de Biji Biji Initiative pour cette inoubliable accueil, un accueil et une énergie fondés sur les mêmes valeurs humaines que celles qui animent Geocyclab et qui viennent confirmer que la culture et le partage au sens large du terme sont des sources d'élévation intellectuelle et spirituelle de la pensée. Une fois n'est pas coutume alors, merci les amis, merci pour tout !
Et nous revoilà sur le départ, le vrai, prêts à reprendre la route pour un nouveau voyage, enfin…
Personnellement, j'appréhende un peu la reprise de l'exercice, la chaleur, la sortie de Kuala Lumpur sans GPS pour nous orienter, la pluie qui menace de tomber et de frapper fort, mais je suis aussi excité à l'idée de reprendre le projet, de goûter un peu plus à l'aventure, d'aller un peu plus loin tout simplement. Même si ces derniers mois ont été productifs, la sédentarisation fut aussi synonyme d'hibernation et aujourd'hui enfin, le réveil sonne.
Il est déjà 15 heures, comme prévu les aux revoir s’éternisent et il faut vraiment qu'on y aille maintenant ! Le premier coup de pédale est rassurant, la sortie de la mégapole se gère sans accrocs particulier, il ne pleut pas mais le ciel reste couvert, la température s'avère donc supportable (disons que l'on à vu pire). Je redécouvre mes muscles et mon genou gauche qui commence déjà à grincer, les joies de la transpiration et la saveur de l'eau quand on a vraiment soif. En chevauchant nos montures nous changeons aussi de statut, nous ne sommes plus deux blancs-becs aux allures de touristes et redevenons des étrangers qui pédalent allongés sur des vélos sortis du futur, un peu fous sur les bords, des aventuriers des temps modernes que les routiers aiment à saluer du klaxon et que les curieux questionnent sans retenu. Nous attirons l'attention, c'est parfois chiant mais cela nous donne l'avantage de rencontrer pas mal de monde sur les bords de route.
65 kilomètre en 4 heures de temps… On est pas mal. Nous arrivons donc à Kuala Sengalor, ville située au nord ouest de Kuala Lumpur, à quelques centaines de mètres de la côte. La nuit est tombée, il pleut et nous éprouvons quelques difficultés à trouver de quoi dormir. C'est après quelques recherches via l'oncle google que nous trouvons enfin le campground que nous cherchions désespérément. La nuit masque de décor, tout ce que je sais c'est qu'à la place d'une plage de sable fin, nous profitons des moustiques de la mangrove voisine. Le gardien du parc, après nous avoir refusé l'autorisation de camper accepte quand je lui précise que nous avons de quoi payer le loyer (1 euros par personne), il dit « ok ok ok » mais ne nous à jamais réclamé son dû… Ok ok ok, il y a surtout un problème de communication. Quoi qu'il en soit, une chose est certaine, on a bien repris la route et Geocyclab est de retour.
Jour 596 - De Kuala Lumpur à Penang
Vendredi 15 août 2014 - 50 kms - Post n° 521
Barth : Ça y est, Geocyclab a enfin retrouvé le goudron, la sueur et et le vacarme de la route asiatique. Ce n'est pas encore le rythme de croisière pour notre atelier mais cette remise en jambe de quelques jours fut rassurante après notre longue sédentarisation à KL. Les vélos fonctionnent toujours et les muscles ne sont pas trop rouillés !
Difficile de ne pas repenser à notre épisode mexicain en prenant congé de tous nos amis à Biji Biji… De la Malaisie je n'aurais donc vu qu'un petit quartier périphérique de Kuala Lumpur, quelques sites plus ou moins touristiques aux alentours et la route côtière qui nous mène jusqu'à Penang. Si peu de choses en comparaison de l'étendue du territoire malaisien mais assez pour me faire une idée sur cet étrange pays. Je prendrais le temps de m'étendre un peu plus sur le sujet quand nous sortirons du pays, mais pour l'heure nous voici donc rendus à Georgetown sur l'île de Penang, plus très loin de la frontière thaïlandaise, pour une dernière escale studieuse… Je laisse à Fanch le soin de vous en dire un peu plus sur cette semaine de route pour me replonger dans les montages vidéos entre autres choses.
Fanch : Nous nous réveillons parmi les singes, Kuala Lumpur est déjà loin derrière . On pourrait presque se croire dans une scène du Livre de la Jungle s'il n'y avait pas cette zone commerciale traversée par une 2×2 voie à quelques centaines de mètres du parc dans lequel nous avons élu domicile. Mais l'impression est plutôt sympa et je ne me lasse pas d'observer ces animaux au comportement déroutant.
Le chemin que nous empruntons est loin de la petite route de campagne que j’espérais fouler en longeant la côte (le but était d'éviter l'autoroute reliant Kuala Lumpur à Penang). Mais ni Barth ni moi même ne sommes surpris de constater que nous évoluons bel et bien sur un axe principal avec un trafic dense, bruyant et nauséabond, je crains bien que cela ne va pas s’améliorer d'ici Penang à 350 bornes plus au nord. Et à quelques exceptions près, mon instinct va malheureusement se confirmer, la circulation ne nous laisse pas la chance de rouler dans le silence, l'air est saturé de gaz d'échappement, les scooters, bagnoles et camion nous doublent sans cesse tout au long de cette épopée malaisienne.
Les paysages ne sont pas non plus à couper le souffle. Pour résumer, nous avançons dans une gigantesque palmeraie. Sur notre gauche tout de même, la mangrove fait régulièrement son apparition, une végétation dense, opaque et hostile. Mais le palmier à huile a le monopole, il est partout. Chaque parcelle exploitable est colonisée par l'industrie de l'huile de palme… C'est chiant pour les yeux mais c'est surtout un véritable désastre. Oui je sais, je radote mais je n'ai pas d'autres choix que de dénoncer ce génocide écologique de grande ampleur… Plus nous avançons dans cette forêt uniforme, entre ces alignements de palmiers, plus je réalise l'ampleur des dégâts et ça me sape clairement le moral. J'essaie tant bien que mal de rester positif mais devant tant de connerie je ne peux qu'imaginer un avenir triste pour l'humanité… Et ouais, l'huile de palme n'est pas un problème isolé et si rien ni personne n'est capable de résister aux griffes de l'industrie agro-alimentaire, si les gouvernements concernés continuent à baver devant l'or que leur proposent les lobbies, alors qu'on se le dise, on fonce droit dans le mur. Juste pour info, d'ici 2020, la consommation mondiale d'huile de palme est susceptible de doubler, il va falloir planter sévère ! Et déjà le gouvernement malais propose à ses citoyens d'investir dans dans le marché. Cédez moi vos terres, cramez tout ce qui s'y trouve en surface puis plantez du palmier et vous récolterez 20% des bénéfices… 20%, ça suffit largement à trouver des adeptes.
Enfin bref, l'asphalte est ponctué de cités portuaires et industrielles aux noms difficile à retenir. Pas particulièrement aguichantes et bien souvent bouillonnantes d'activité, elle font principalement office d'étapes pour le transport de marchandises. D'un autre côté, avec la croissance économique du pays les petits business prolifèrent, chacun veut tenter sa chance et il en résulte une multitude de petits commerces et de restaurants qui poussent en périphérie des centres villes. La Chine est encore très présente dans les zones urbaines, l'Inde, le Bangladesh et le Pakistan un peu moins mais quoi qu'il en soit, et même en campagne, la culture malaisienne reste très métissée, il n'est d'ailleurs pas rare d'apercevoir trois différents lieux de cultes dans notre champ de vision.
Notre environnement physique n'est pas des plus idylliques mais fort heureusement les rencontres sont toujours placées sous le signe de la bonne humeur. Les sourires sont au rendez vous, klaxons et pouces levés en guise d'encouragements sont coutume, les curieux posent toujours les mêmes questions même si je ne suis pas certain qu'ils prennent au sérieux les réponses que nous leurs offrons… Quand il s'agit de dégoter un plan dodo, il y a toujours quelqu'un pour nous aider à trouver un lieu sûr où poser nos moustiquaires. Que ce soit dans un jardin public, dans la cour d'une école ou encore dans la mosquée d'un petit resto de bord de route, il nous suffit de demander pour débusquer un abri pour la nuit (quand il pleut, il pleut fort et les tentes ne résisteraient pas longtemps aux intempéries). Un petit bonus pour Erwan qui en plus d'avoir un nom breton nous à dégoté un spot trois étoiles dans le petit port Sungai Kerang avec une vue imprenable sur la mangrove… Moustiquaire indispensable. Erwan, photographe le jour, aide soignant la nuit, a aussi pris le temps de partager quelques instants avec nous, quelques histoires et un petit déjeuner et je crois bien qu'il a envie de venir à Penang ce week end pour faire plus amples connaissances.
Penang justement, nous y voilà. Vendredi 15 août, après 5 jours et 420 kms nous arrivons à destination un peu nazes, complètement trempés par la dernière averse (qui ne nous a pas arrêté…) mais bel et bien vivants et tout bronzés ! Nous pensons nous y poser quelques jours pour rester travailler avant de reprendre la route de la Thaïlande.
Au programme de la semaine à venir, tourner et monter le Checkpoint 010, terminer le montage du trailer, mettre à jour le carnet de bord, lancer le projet sur la plateforme de financement collaboratif d'Ulule et boucler pas mal de dossiers administratifs encore en cours. On a du pain sur la planche. Mais il y a un petit hic… Notre contact qui s'était proposé pour nous héberger s'est désisté, voilà donc notre plan dodo-boulot qui tombe à l'eau. Nous passons donc l'après-midi à chercher de quoi loger gratuitement ou pour pas cher mais malheureusement sans résultat. Nous n'avons plus qu'à réserver un petit hôtel pour une ou deux nuit, pour la suite… Et bien, on verra bien ce que nous réserve l'avenir.
Jour 603 - Noodles, boulot, dodo à Penang
Vendredi 22 août 2014 - 0 kms - Post n° 522
Barth : Georgetown est une ville très agréable à vivre, un endroit parfait pour la semaine studieuse que nous venons de passer. Malgré le pont qui relie Penang au continent et les nombreuses tours qui gâchent un peu le paysage, nous sommes bel et bien sur une île et l'atmosphère s'en ressent. Nous avons rapidement dégoté un petit hôtel tout à fait raisonnable pour notre maigre budget, et Jeremy le tenancier des lieux est au petits soins avec nous, allant jusqu'à nous offrir de sa poche quelques nuits en échange du dépannage de sa tablette que Fanch aura eut un malin plaisir à faire.
Comme toujours, nous avons trouvé quelques cantines à notre goût, chinoises et indiennes pour alterner les saveurs, et malgré les nombreuses rencontres avec les voyageurs de passage nous arrivons à être concentré sur la multitude de choses à accomplir avant de reprendre la route. Mis à part quelques difficultés pour tourner le dernier checkpoint en raison du bruit omniprésent (on est en Asie tout de même !), les choses avancent bien et d'ici quelques jours nous pourrons reprendre la route l'esprit léger.
A l'image de la Malaisie, Georgetown est une ville multi-culturelle, et également porteuse de nombreux événements artistiques dont nous avons pu rapidement profiter. En particulier le festival de photographie « Obscura festival » qui nous a donné l'occasion de quelques visites d'expositions, et de talk-shows en compagnie de Rita, Dany et Armand, trois espagnols vraiment adorables avec qui nous avons sympathisé. Nous n'avons hélas pas eut assez de temps pour aider Zul, notre ami musicien rencontré lors du festival Belia à Kuala Lumpur.. Ce dernier est resté très impressionné par notre installation de plantes sonores et a vraiment envie de se mettre à Arduino…
Hier soir, nous nous sommes fait piégés par un orage en allant dîner et à défaut de canoë, le retour à l'hôtel s'est fait en pataugeant dans cinquante centimètres d'eau qui recouvrait toute la rue. Le lendemain c'est au tour du feu de nous surprendre au coin d'une rue. une cérémonie chinoise nommée « hungry ghost » qui consiste à enflammer une immense statue de papier au beau milieu de la chaussée. Quelques degrés supplémentaires dans l'atmosphère déjà bien chaude de la Malaisie, mais un spectacle visuel impressionnant !
Côté boulot, pendant que Fanch s'est courageusement plongé dans nos histoires de visas, de carte bancaires qui expirent, et de courrier avec nos partenaires en France, j'ai repris le rythme du montage vidéo… Le Checkpoint 010 est donc fin prêt, talonné par la petite vidéo de présentation de Geocyclab qui va nous aider à attirer les donateurs vers notre campagne de financement collaboratif sur Ulule. C'est un peu notre dernière carte, et nous avons décidé de jouer le tout pour le tout. Et en guise de bon augure, Anaïs vient de nous informer que la garantie de notre ancien ordinateur a fonctionné, ce qui veut dire que nous allons pouvoir le revendre pour amortir encore un peu les dépenses que cet épisode avait occasionné. Le vent tourne peut-être enfin pour Geocyclab, et pour l'heure il est temps de reprendre la route et quitter enfin la Malaisie dans quelques jours. Thaïlande, Haïkus, kilomètres, nous revoilà !!!
Jour 610 - Objectif Thaïlande
Vendredi 29 août 2014 - 100 kms - Post n° 523
Barth : La fin de notre séjour à Penang s'est un peu éternisée, le temps de boucler et mettre en ligne le dernier Checkpoint assorti du trailer de présentation de Geocyclab, de lancer la campagne de financement sur Ulule dans la foulée, et de fignoler tout un tas de petites choses administratives avant de reprendre la route. Durant nos rares moments libres nous profitons des derniers jours de présence d'Armand, l'espagnol avec qui nous avons pris l'habitude de refaire le monde autour d'un dîner dans notre cantine indienne, puis avec Kamel qui débarque de Paris et se présente comme champion de bahasa (la langue parlée en Indonésie et en Malaisie), et bien sûr avec notre ami Zul que nous n'avons malheureusement pas le temps de visiter dans le sud de l'île… La pluie nous force à restée une dernière journée consacrée au repos, nécessaire après ce marathon de boulot.
Jeudi 28 août, le temps de petit déjeuner, de boucler les bagages, de laisser un message dans le livre d'or et de faire nos adieux à Jeremy, et nous voilà partis en direction du port. Un varan barbote sous nos pieds le temps d'attendre le ferry qui nous amène rapidement à la gare. L'objectif consiste à tenter de prendre le train pour nous rapprocher au maximum de Bangkok et finir la route à vélo car le temps nous est compté avec notre visa birman et nous n'avons pas le temps de pédaler les 1000 kms qui nous séparent de la capitale thaïlandaise.. Pour avoir déjà pris ce train en rejoignant Anaïs il y a deux mois, je doute fort que nous puissions y embarquer nos vélos mais nous allons tenter le coup, on ne sait jamais.. Pas de problème pour acheter les tickets, le chef de gare nous assure que c'est possible.. Encore une bonne heure d'attente avant de démonter en dernière minute et en vain nos montures, car le chef de train lui n'est absolument pas du même avis.. Nous regardons donc le train partir, un peu énervés d'avoir perdu autant de temps pour rien, et après nous être fait remboursé les billets et remonté nos bécanes nous prenons donc la route à vélo en direction de la frontière où il devrait être possible cette fois d'embarquer nos vélos dans le train…
La météo est avec nous, et malgré ce départ tardif nous parvenons à enchaîner une cinquantaine de kilomètres avant que la nuit ne nous oblige à stopper. Nous bifurquons alors sur la gauche pour explorer une sorte de petit village de bord de route qui a l'air accueillant.. Pas le temps de chercher bien longtemps, Pin et Wey nous avaient repéré et viennent à notre rencontre. Cyclistes tous deux ils ont compris rapidement ce que nous cherchions et nous entraînent sur une sorte de place où se prépare la soirée d'ouverture d'une dizaine de jours de festivités chinoises.
Une douche, un dîner gratuit et deux lampes pour nos vélos nous sont offerts par nos amis. Quel accueil ! Puis un spectacle de théâtre traditionnel commence, les costumes et les chorégraphies sont magnifiques mais la sono foireuse rend l'épreuve assez insoutenable pour nos têtes fatiguées par le trafic de la route. Une pause pour nos oreilles le temps d'aller boire un verre dans la rue d'à côté et la soirée se poursuit entre discussions avec les curieux, réparation de fortune des sacoches de Fanch qui baillent aux corneilles par le fond depuis ce matin. Wey repasse nous voir avant d'aller se coucher et nous papotons un peu plus en sirotant une étrange soupe sucrée avant que le spectacle ne s'achève enfin. Les acteurs sont ensuite embarqués dans une cérémonie religieuse qui se tient en parallèle et que nous ne comprenons pas vraiment. Une sorte de rituel d'invocation qui s'achève sur les cris d'une des actrices dont les nerfs semblent avoir lâchés. C'est la fin, les bières sortent, la nourriture est toujours là, mais nous décidons de sortir les matelas à quelques mètres pour essayer de dormir un peu…
Nos sympathiques hôtes chinois ont joué les prolongations jusque très tard dans la nuit avec la discrétion qui fait leur réputation, nous n'avons que très brièvement fermé l’œil cette nuit et le lever à six heures est un peu vaseux. Nous saluons Wey qui part au boulot, avant de reprendre notre route. Les kilomètres s’enchaînent bien entre quelques pauses pour manger ou boire un limau ais (citronnade) et nous croisons Tom, un cycliste allemand qui fait la même route que nous en sens inverse et qui nous donne des informations surprenantes sur le Pakistan, le Bengladesh et la Birmanie, gros points d'interrogations sur notre parcours à venir. Malgré les nuages, la chaleur et le manque de sommeil nous forcent à stopper au bord d'une rivière pour dormir à l'ombre une heure ou deux. Toujours quelques varans qui barbotent dans une eau café au lait…
L'après-midi, notre avancée se poursuit dans un paysage changeant. Les palmiers à huile laissent la place aux rizières et on aperçoit quelques pitons rocheux qui annoncent notre arrivée prochaine en Thaïlande. Avec cent kilomètres au compteur, nous trouvons refuge à l'entrée de Kangar, la dernière ville avant la frontière et dînons à la cantine indienne locale en prenant quelques nouvelles d'Ulule sur internet. Déjà 30% en à peine quelques jours, ça démarre fort !
Dernière nuit en Malaisie, nous passerons la frontière demain matin si tout va bien. Comme jamais j'ai hâte de sortir de ce pays, de tourner cette longue page et de changer de culture…