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Jour 192 - Marché Capital, Nouakchott

Mardi 9 avril 2013 - 0 kms - Post n° 192


Barth : Synchronisation du site aujourd'hui, au café vu que la connexion de l'auberge ne fonctionne toujours pas bien… A midi, c'est réglé, le temps d'avaler un morceau et nous filons en direction des ateliers de fonderie aperçu la veille… Nous arrivons trop tard, c'est le matin qu'à lieu la fonte de l'aluminium, nous reviendrons demain. En poussant un peu la promenade, nous tombons au bord de la rue sur un lieu improbable en bordure d'une palmeraie. Une pancarte indique qu'il s'agit d'un programme de récupération de déchets inauguré en 2007 en partenariat avec l'ambassade de France. L'homme qui tient le lieu est ravi de nous faire découvrir l' amoncellement de bouteilles, en plastiques ou en verre, triées par types, qui forment une sorte de caverne surréaliste où il nous prie de rentrer. Le programme n'a pas vraiment eu de suite, mais l'homme continue d'accumuler ces récipients qu'il revend au compte gouttes à qui le veut. Étrange mise en scène des ordures de Nouakchott !

Un peu plus loin, alors que nous engageons la conversation avec quelques métallurgistes, un homme en boubou vient me dire de ne pas prendre de photos… Cela arrive souvent, la levée de l'interdiction officielle d'il u a quelques années n'ayant sans doute pas convaincu tout le monde… On attend un peu qu'il s'éloigne, avant de reprendre notre conversation qui se termine autour d'un thé dans un atelier voisin. Ici on fabrique des réchauds à charbon ou à gaz, des fer à repasser au charbon en pliant de la tôle récupéré sur des carrosseries automobiles. En retraversant le petit marché crasseux des métallos, un homme qui se dit comédien nous parle de son ouvrier qu'il surnomme « mon zanimo », nous faisant bien comprendre que ce dernier dépend totalement de lui… Humour décalé, réalité sociale ? Difficile de dire ce qu'il en est vraiment…

Sur le retour, nous passons saluer Alassane qui vient de terminer un nouveau modèle de réchaud avec plateau incorporé. Il est avec sa femme et ses deux enfants aujourd'hui. Nous partageons un thé en écoutant le récit de son parcours… Il a quitté le Mali il y a plusieurs années déjà pour venir gagner de l'argent à Nouakchott, ou attendre que son frère ait réussi à gagner l’Europe et à lui envoyer une somme suffisante pour retourner au Mali et reconstruire la maison familiale à Bamako. Nous déclinons son offre de nous faire cadeau de son dernier modèle de panier réchaud, en lui expliquant que nous voyageons à vélo, puis nous prenons congé avec dans l'idée de repasser le lendemain !

De retour à l'auberge, nous passons la soirée à discuter avec Peter, père de deux enfants qui se trouve sur la route du retour en Hongrie après avoir passe l'hiver en famille en Casamance comme tous les ans depuis 2007. Il nous fait part de son désespoir quand à la situation économique et sociale de la Hongrie et plus largement de l'Europe, qui explique en grande partie ce choix de vivre une transhumance annuelle dans une région aussi lointaine. On est loin de l'exode hivernal des retraités français aperçus au Maroc, même si le principe est le même…


Fanch : Direction… Les ateliers de chaudronnerie. Nous traversons de nouveau le marché Capital, plus rapidement ce coup ci. Hop hop hop, nous slalomons à travers les étals, changeons de trottoir et rentrons le ventre pour pouvoir se faufiler entre les dizaines bagnoles garées en vrac, hop hop et paf, on se casse le nez. Amodou est là et nous annonce que nous sommes arrivés trop tard. Il est 15 heure seulement et la journée de travail touche à sa fin. Bon, ok, ce coup ci le rendez vous est pris pour 11 heure demain, sans faute !

Alors GO! On pousse plus loin, coupe à travers le marché aux volailles, enchaîne poignée de main, un thé par ici, un autre par là, un petit brin de causette et hop, nous nous retrouvons dans une rue qui me semble mener au quartier 5ème et qui longe une palmeraie. C'est ici que nous faisons la connaissance d'Houssein, un peu allumé sur les bords mais de son rire franc, il nous propose de faire halte pour échanger quelque mots. Il faut dire que le cadre où se déroule la scène et dont Hussein est le gardien attire notre attention. Des centaines, que dis-je, des milliers de bouteilles, de bocaux et de bidons habillent ce petit bout terrain à la lisière de la plantation de palmiers. Au premier coup d’œil cela s’apparente à une déchetterie comme nous les connaissons mais rapidement mon regard se change et je vois des « déchets » bien rangés, classé avec des critère de sélection précis comme s'il s'agissait d'une collection. Bon, il faut bien avouer que ce n'est pas aseptisé comme un couloir d'hôpital mais la classification reste néanmoins évidente.

Notre homme à la fâcheuse tendance à changer de sujet avant même que je comprenne ce dont il cause, mais avec beaucoup de concentration j'arrive à décrypter (enfin je crois) ce dont il s'agit. Tout cela à commencé en 2007 lors d'un concours de recyclage lancé par une organisation étatique, le vainqueur aurait dû être le plus grand récupérateur de bouteille de Nouakchott mais seulement, jamais personne n'a mit terme à la compétition, un petite histoire sans fin. Le pauvre Houssein nous fait part de son désarrois mais il semble s'en être remis et il parvient à gagner quelques petits sous en revendant le plastique de sa collecte à quelques autochtones avident de contenant… Vide. Tout se récupère ici et beaucoup font de cette pratique un modeste gagne pain.

Sur le chemin du retour nous saluons L'inventeur du Fourne en fil de fer, Alassan nous présente sa famille, on papote un peu, acceptons un dernier thé avant de refaire route vers l'auberge. Notre acclimatation suit son cours à tel point que l'envie de prendre quelques jours supplémentaire ici se fait ressentir. D'ailleurs, nous venons de prendre la décision de faire un bout de chemin en compagnie de Camille et à sa demande, nous ne partirons que dimanche prochain en direction du Sénégal. Comme j'aime tant le dire… Affaire à suivre !

Alassane et sa petite famille

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