Inde (Est)
Distance parcourue : 300 kms
Durée : 19 jours
Date d'entrée : 2014-10-26
Date de sortie : 2014-11-13
Jour 670 - Premiers pas en Inde
Mardi 28 octobre 2014 - 5 kms - Post n° 542
Barth : Dimanche matin, premiers coups de pédales sur le territoire indien dans la fraîcheur du début de journée. Nous n'avons qu'une quarantaine de kilomètres à parcourir pour traverser le petit bout de plaine qui sépare Kakchin de Impahl, ville moyenne située au pied d'une nouvelle chaîne de montagnes. Nous avons choisi d'éviter la route principale pour profiter du relatif calme de la campagne sur une route secondaire. Mais nous sommes bel et bien en Inde et la densité de population n'a plus rien à voir avec celle que nous avions l'habitude de fréquenter en Birmanie ou en Thaïlande. A chaque arrêt une foule de curieux se presse autour de nos étranges montures, grandissant sans cesse tant que nous ne reprenons pas la route, et je réalise à quel point nos deux années d’expérience de la route, principalement en Afrique et en Indonésie, vont nous servir à gérer ce genre de situation. Malgré leur grande curiosité, les indiens n'en sont pas moins adorables et nous nous sentons plus que bienvenus sur ce nouveau territoire. Une question revient souvent, que nous n'avions pas l'habitude d'entendre auparavant : « What is the purpose of your visit ? » Qu'est ce qu'on vient faire ici, en d'autres termes… La réponse est inlassablement la même, ne satisfaisant pas toujours notre auditoire : « Votre région est sur notre route pour rejoindre la France… »
Nous atteignons Impahl vers midi, première ville de notre parcours, et le temps de trouver un hôtel et de manger un morceau, j'ai déjà l'impression d'avoir changé de monde et d'époque. La crasse, le bruit, les odeurs, les vaches qui déambulent dans les ruelles en broutant des tas d'ordures, et tous ces visages qui se déclinent à l'infini sous mon regard hypnotisé, nous sommes en Inde pas de doute ! Le temps est pluvieux et il fait presque froid, ce qui ajoute à l'effet de dépaysement total en sortant des tropiques. Ici comme ailleurs, la globalisation est visible. Smartphones, fringues fashion et autres accessoires du monde moderne font parti du décor, mais pourtant il y a quelque chose qui n'a pas bougé depuis des siècles, une énergie indescriptible qui recouvre toutes ces apparences et me font me sentir vivant, présent, et à ma place malgré les regards interloqués de la plupart des gens qui nous aperçoivent. La nourriture y est certainement pour beaucoup dans cette sensation de bien être. Je revis en dégustant quelques pâtisseries et un tchai brûlant qui me font instantanément oublier les plats froids baignant dans l'huile de la Birmanie.
Nous passons deux nuits à Impahl. Le temps de bosser un peu, de discuter du prochain Checkpoint que nous allons bientôt tourner et d'organiser notre nouvelle étape en bus pour traverser la montagne. Le mardi matin, une fois le petit déjeuner avalé, nous arrivons un peu avant l'heure au terminal de bus, anticipant le chargement toujours compliqué de nos bécanes. Quand tout à coup, surgit de nul part, voilà Mithun qui nous retombe dessus ! Incroyable ! Encore une fois nous avons tout juste le temps de partager un tchai, mais c'est sûr, jamais deux sans trois !.. Et c'est parti pour huit heures sur une route défoncée, dans un bus dont les amortisseurs ne sont qu'un lointain souvenir, avec quelques pauses pipi et une crevaison. Nous traversons quelques villes accrochées aux flancs de la montagne et encore une fois je me sens totalement dépaysé.. Les dernières montagnes que nous avons fréquenté n'était habitées que de quelques villages ruraux totalement coupés du monde, alors une ville en pleine montagne, c'est juste incroyable ! Et je reste bouche bée en apercevant au détour d'un embouteillage la profondeur d'une boutique qui semble ouvrir sur une ville souterraine. Je m'étais tellement habitué à ces villes de bord de route où l'on aperçoit les rizières derrière la première rangée de bâtiments…
Les habitants de cette région sont originaires d'une multitude d’ethnies différentes, pas spécialement typées indiennes mais donnant parfois l'impression de nous balader au Tibet, en Chine, ou d'être encore en Birmanie… Nous arrivons de nuit à Dimapur, à la sortie de la montagne, d'où nous allons enfin reprendre la route à vélo après une bonne nuit de sommeil pour nous remettre de toutes ces émotions.
Jour 672 - Une nuit au temple Hindou Deopani
Jeudi 30 octobre 2014 - 65 kms - Post n° 543
Barth : Nous avons quitté Dimapur hier matin sur une route toute neuve qui dévale la montagne. Au bout d'une vingtaine de kilomètres une chose incroyable s'est produite. Après avoir passé un checkpoint militaire, une sensation étrange nous a perturbé tous les deux, cela faisait un quart d'heure que nous n'avions pas croisé un seul véhicule… Le paradis pour des voyageurs à vélo ! Nous sommes sur une route impeccable et à part le ronronnement de nos chaînes sur nos pignons, rien ne vient perturber le chant des oiseaux. Et tout à coup, un convois de camions nous double pendant une dizaine de minutes, dans un vacarme assourdissant. Puis, plus rien de nouveau… On ne va pas se plaindre, mais ce n'est pas très rassurant de se retrouver seuls à un endroit où on ne devrait pas l'être sans aucune explication. Nous apprenons un peu plus tard en discutant avec un jeune népalais que la région est en couvre feu sur décision gouvernementale pour calmer des manifestations. Malgré les inconvénients que cela impose aux habitants d'ici, je prend cette incroyable mise en scène comme un signe de bienvenue de la part des autorités…
Qui dit couvre-feu, dit difficultés pour trouver une boutique ouverte et de quoi se restaurer. Mais en nous écartant de la route nous trouvons tout de même un petit restaurant ouvert. Le patron, ancien militaire à la retraite, nous accueille chaleureusement et tient à nous faire visiter le vieux temple hindou de Deopani situé juste derrière le village. Nous y rencontrons quelques moines qui vivent là et malgré le peu de kilomètres parcourus aujourd'hui, nous décidons de rester pour y passer la nuit… Après un brin de toilette dans la rivière, nous sommes embarqués dans une cérémonie informelle en hommage à Shiva, partageant le shilum avec un vieux sadou bavard qui ne comprend pas qu'on ne le comprend pas quand il parle hindou, d'un jeune moine qui parle un peu anglais et qui nous explique l'autre nom de Shiva entre deux bouffées, et d'un sourd muet qui semble tout droit sorti de la pochette d'album « Sergent Pepper » des Beatles. Depuis le début de ce voyage, j'essaye de me défaire des stéréotypes que nous avons tous sur les pays avant d'y être allé, mais cette fois je dois avouer que je ne suis pas déçu !
Vers 19h le dîner est servi par notre restaurateur dans sa boutique fermée.. Une dernière joute verbale avec le sadou et il est temps de dormir en écoutant les cloches de la cérémonie religieuse qui clôture la journée en se mêlant au chant des crapauds..
Le lendemain, levés aux aurores, nous prenons congés de nos hôtes après avoir reçu des étoles traditionnelles en cadeau de la part du guru et s'être pliés à la désormais traditionnelle séance de poses photographiques. Le patron du restaurant nous attend pour nous emmener à moto jusqu'à un autre petit temple où nous recevons la bénédiction du moine qui tient le lieu, avant d'avaler un petit déjeuner. Nous reprenons ensuite la route, escortés sur quelques dizaines de kilomètres par notre ami à moto, puis par une voiture de la police qui gâché le silence de la foret.
Jour 674 - Trois jours chez les Assams
Samedi 1 novembre 2014 - 0 kms - Post n° 544
Fanch : Nous nous habituons à ces nombreux conducteurs de scooters qui après nous avoir repéré roulent au pas, téléphone portable au point qui filment et photographient sans modération allant même jusqu'à improviser une interview amateur… Mais ces deux-là, perchés sur une moto sportive semblent aussi intéressés pour échanger un brin de causette. Il nous suivent depuis une dizaine de bornes déjà et quand ils sortent une tablette de chocolat… On décide de stopper la machine et de faire une pause. Après cette rapide introduction, Rakib et Hassan nous accompagnent une autre petite dizaine de bornes supplémentaires avant de nous faire craquer… « Ok Rakib, let's go » on va dormir chez toi ce soir, il nous reste cinq jours pour avaler les 300 bornes qui nous attendent jusqu'à Guwahati, on peut se permettre un petit demi-tour.
Et c'est là que l'aventure en pays Assam débute.
Nous voilà 10 bornes en arrière, dans l'humble demeure de Rakib située à Doigrung, petit village au bord de la N1. Son père nous accueille en djellaba, barbe et cheveux teintés en rouge, il se prépare pour aller à la mosquée, son regard à la fois sérieux et bienveillant nous met rapidement à l'aise. Rakib de son côté semble aux anges, il nous promet déjà une soirée mémorable alors que la pièce principale de la maison se remplit de jeunes voisins curieux venus observer les étrangers.
Une fois la nuit tombée, une douzaine de personnes débarquent dans la petite maison, les amis de Rakib… On part en piste. Barth, malgré une crève qui s'accentue décide de suivre le mouvement, direction Golaghat, la ville d'à coté. Là, nous rencontrons le reste de la bande qui squatte comme chaque jour à la même heure depuis plus de 15 ans le même petit bout de trottoir, lieu de rencontre, de bavardage et de déconnade entre potes. Nous devenons le principal sujet de conversation et Rakib semble fier de nous intégrer à la bande. En ce qui nous concerne, nous resterons admiratifs face à cette équipé de potes soudés par des liens apparemment indestructibles. C'est Rakib qui régale le repas du soir dans une cantine muslim, bœuf korma, bœuf kofta, et cervelle… De bœuf évidemment. Nous sommes en Inde, au pays des vaches sacrées certes, mais un bon bout viande bovine n'a jamais posé problème aux musulmans.
Le lendemain est un jour de grève dans le district de Golaghat, je n'en ai pas retenu la raison mais les boutiques ainsi que les axes routiers seront fermés pour 24 heures. Rakib nous explique que la route peut se révélée dangereuse en l'absence de circulation, personnellement je pense qu'il veut surtout que nous restions un jour supplémentaire… Ok, qu'il en soit ainsi cher Rakib et puis Barth n'est pas au plus haut de sa forme, c'est peut être plus responsable de ne pas rouler aujourd'hui. En fait notre ami nous a planifié tout un programme, un programme chargé qui débute par une visite aux cousins où un tchai épicé nous attend, nous passons ensuite dire bonjour à la famille d'un pote où un autre tchai nous sera servi, puis une autre « cérémonie » (c'est le même rituel tchai-biscuit qui semble se répéter) dans une autre maison familiale. Nous faisons donc le tour du village, honorés par cet accueil exceptionnel mais aussi avec l'impression d'être exhibés comme un objet rare trouvé au bord de la route. Ce soir, c'est la télévision régionale qui se mêle de la partie au centre de Doingrung, rameutant une foule en délire. L'instant est à la fois fou, chaotique et extraordinaire, nous ne contrôlons plus rien et sommes pris à parti dans le lancement d'un programme politique « Clean India » commandité par le premier ministre actuel et qui vise, comme son nom l'indique à nettoyer l'Inde, il y a du boulot… Balais en main, nous voilà à nettoyer le trottoir sous les feux des projecteurs…
Le troisième jour devait être celui du départ mais rien y fait. Nous sommes une fois de plus tenus d'aller rendre visite à la famille d'un ami de Rakib qui nous attend pour le petit déjeuner. Rakib ne nous en avait pas causé auparavant et cela ne nous enchante guère (nous sommes maintenant en retard sur notre planning) mais avons nous le choix ? Finalement nous serons trimbalés toute la journée sans avoir vraiment la possibilité de donner notre avis sur le déroulement des événements, sans avoir la possibilité de faire 100 mètres en solo… Un autre repas est programmé ce soir dans la demeure de la famille d'Hassan, probablement le dernier car pour le coup, nous insistons auprès de notre ami pour partir demain… Dès l'aube.
Bien sûr, nous aimons nous retrouver dans de nouvelles situations (c'est entre autre l'objectif du voyage), que ce soit le temps d'une pause ou pour une semaine, mais parfois celles-ci nous échappent et ça va un peu trop loin. Chez Rakib et ses potes, nous nous sommes subitement retrouvés au centre de toutes les attentions, avec tous les honneurs et avantages que cela inclue bien sûr mais nous nous sommes fait encerclés, encadrés et chaperonnés sans trop savoir comment s'en sortir. L'Inde, ordinairement extraordinaire se dévoile généreuse et hospitalière mais il va aussi falloir apprendre à ne pas se laisser happer par les événements au risque de ne plus être maîtres de nos mouvements.
Jour 678 - Route vers Guwahati
Mercredi 5 novembre 2014 - 0 kms - Post n° 545
Fanch : Nous reprenons enfin la route, bien entendu escortés pas Rakib et quelques potes qui nous suivent sur encore 30 kilomètres. Les adieux, même si ceux-ci annonce un certain retour à la liberté, ne sont évidemment pas facile car ces trois derniers jours furent l'occasion de tisser des liens forts avec notre hôte et toute sa bande. Une chose est sûr, nous ne sommes pas prêts d'oublier notre séjour chez les Assamis. Quelques accolades plus tard, nous roulons entre les plantations de thé noir, un thé de qualité, qui fait la fierté des locaux. Le décor est somptueux pour ne pas dire magique quand la lumière filtrée par le feuillage des vieux arbres inonde les clairières. Les jardin de Versailles n'ont qu'à bien se tenir… 20 kms plus loin, nous entamons la traversée du parc national de Kaziranga, mondialement réputé pour sa large population d'éléphants sauvages, de tigres du Bengale et de rhinocéros unicornes. Le paysage est là aussi fantastique et quand mon regard fixe l'horizon je me perd à l'époque du Jurassique… Enfin presque.
Un petit mot sur l'épisode des rhinocéros tout de même… Nous les apercevons au loin, en train de brouter nonchalamment une herbe probablement délicieuse. Mais nous ne sommes pas seuls, un petit groupe de touristes locaux s'est formé sur les bas côté de la petite route, pour beaucoup, ils observent tranquillement les mammifères via les écrans de leur smartphones et autres appareils à écran digital. Nous aurions voulu en faire autant mais notre arrivée va changer la donne. À peine arrêtés et tout ce petit monde se précipite vers nous, les téléphones changent de cible, nous nous faisons encercler en moins de temps qu'il en faut pour le dire, et le panorama disparaît aussi vite… Nous sommes coincés, hors de question d'abandonner les bécanes une minute, c'est les rhinos ou les vélos… Je perd patience et mon sourire avec, je ne supporte plus ces téléphones portables qui nous filment en permanence… On est tous deux d'accord, on dégage pour faire une pause plus loin, sans rhinocéros mais au calme.
100 bornes au compteur, nous rattrapons notre retard et demain on se fait la même ! Nous entreposons les vélos dans une petite chambre d'hôtel à la sortie du parc, à l'abri des regards indiscrets et des petites mains baladeuses, en ce qui nous concerne, une bonne nuit de sommeil s'impose.
Le lendemain, c'est réparti pour un tour. Régulièrement un ou deux scooters nous suivent pour un interrogatoire filmé… C'est bientôt un militaire qui nous arrête tout excité de nous dire qu'il nous a vu sur la chaîne de télévision régionale. Il veut poser avec nous pour une photo souvenir. Assis sur mon siège, alors que je tente de m'adresser à lui, je tourne la tête vers l'arrière, fait un faux mouvement et me coince un nerf. Merde, la douleur est intense et me coupe la respiration… Et tout le monde continue de s'agiter autour, merde, merde, merde, je sature.
Barth comprend rapidement que quelque chose ne va pas, le militaire aura besoin d'un peu plus de temps mais finira tout de même pas remarquer la chose, l’euphorie s'estompe. J'ai besoin de me détendre, de me poser au calme histoire de comprendre ce qu'il m'arrive. Une femme apporte deux chaises, du tchai et des biscuits, Barth sort en urgence son matelas et du baume du tigre, un massage plus tard et quelques minutes allongé à respirer profondément et je me sens déjà un peu mieux. Toute la scène est bien sûr filmée par une dizaine de téléphones… Je fini par m'endormir quelques minutes, à mon réveil la foule s'est dispersée, il ne reste plus que Barth qui discute avec Rupak, ce dernier nous invite plus tard à déjeuner dans la maison familiale en compagnie de son ami Raj.
Nous prenons donc le temps de faire connaissance autour d'un thali improvisé par la mère de notre hôte. Rupak et Raj sont hindous, tout deux brahmanes, ils nous expliquent sommairement le fonctionnement du système des castes qui aujourd'hui, même s'il n'est plus officiel, divise encore la société indienne. Nous les interrogeons au passage sur la nature multi-religieuse du pays et sur leur cohabitation avec les musulmans. La réponse est confuse mais il en ressort qu'Allah n'a pas la cotte.
La douleur disparaît à coup de pommade anti-inflammatoire mais l'espoir de joindre Guwahati en vélo tombe à l'eau. Nous nous contentons des 10 bornes qui nous séparent de la gare la plus proche dans la ville de Nagaon. Rupak et Raj ont insisté pour nous accompagner et alors que nous arrivons en ville, ils nous demandent de patienter dans l'enceinte du commissariat où devrions être tranquilles le temps pour eux d'aller dégoter un hôtel bon marché, sympa les mecs ! Mais le calme est de courte durée puisqu'une équipe télé investira le petit bureau du commissaire. Ils nous suivaient déjà depuis quelques kilomètres, et continuent jusque dans le hall de l'hôtel, nous n'aimons vraiment pas leur façon de faire, délibérément intrusive. Je ne suis pas d'humeure et au risque de passer pour un con, je leur explique que je n'ai pas envie de parler à leur caméra et qu'ils perdent leur temps avec nous. Ça marche. La soirée qui suit se déroule tranquillement, Raj et Rupak se joignent à nous le temps d'un dîner et d'une rapide visite de la ville en moto. Une soirée posée qui nous fera le plus grand bien.
Bonjour!!! Comme je le disais dans l'article précédant, l'Inde est ordinairement extraordinaire… En témoigne cet éléphant, qui vient nous saluer avec grâce à la porte de l'hôtel… Je pensais que ça n'arrivait que dans les films… Nous sommes sur le départ, objectif du jour, choper un train pour Guwahati en espérant pouvoir y caser nos vélos.
La suite au prochain épisode.
Barth : Après quelques heures de train nous arrivons donc à Guwahati, capitale du pays Assam. On monte d'un cran en terme de densité humaine et il est impossible de stationner plus de deux minutes devant la gare sans créer un attroupement de plusieurs centaines de personnes qui a vite fait d'affoler les quelques agents de sécurité. On file donc vers le centre pour trouver un hôtel alors que la nuit est en train de tomber. Deux heures plus tard, après avoir explorer une vingtaine d'adresse en créant le même nombre d'attroupements, on finit par trouver un hôtel qui ne soit pas complet, à un prix un peu au dessus de notre budget habituel.. Certaines personnes s'adressent à nous en disant nous avoir vu à la télévision ou dans la presse, impossible de rester discrets tant que nous ne nous sommes pas débarrassé de nos vélos.
Ce matin, Fanch s'est levé avant moi pour filer directement à la gare pour acheter nos billets pour Lucknow. Il nous reste une semaine pour y retrouver Sanjeev, un ami d'ami chez qui nous pourrons poser nos affaires avant de nous envoler pour Kuala Lumpur. Le compte à rebours commence à se resserrer… Après le petit déjeuner, nous retournons ensemble à la gare pour confirmer notre départ pour le soir même, et nous sommes reconduits gratuitement à l'hôtel par un tuktuk qui nous a vu passer en vélo la veille !
Le reste de la journée est consacré à une exploration du quartier, entre les bidonvilles qui bordent les voies ferrées et un marché électronique qui nous rappelle de bons souvenirs d'Afrique. Une longue pause chez le barbier pour Fanch, une session internet pour apprendre que Sanjeev ne sera pas à Lucknow avant le 10 novembre (tant pis on improvisera) et après un rapide dîner dans la rue c'est déjà l'heure de retourner à la gare, et d'embarquer pour trente-six heures de train…
Jour 683 - Arrivée à Lucknow
Lundi 10 novembre 2014 - 0 kms - Post n° 546
Barth : Voyager autour du monde vous amène à battre toutes sortes de records personnels et cette fois je viens de battre celui de mon plus long voyage en train. Deux nuits et une journée en classe « sleeper » où nous sommes les seuls étrangers, se révèle être une expérience plaisante en dépit de la sinusite qui me tient. J'ai passé le voyage perché sur ma couchette a observer, souvent dans un demi sommeil, l'ambiance de notre wagon… Familles, enfants, vieillards, militaires, étudiants se succèdent au gré des stations, la plupart du temps sans réservation ce qui donne lieu à de joyeuses négociations pour trouver une place. Je me retrouve ainsi pendant quelques heures avec un homme ayant choisi mes jambes en guise d'oreiller, mais je ne peux pas me plaindre quand je regarde l'empilement de corps qui recouvre le sol sous mes pieds. A chaque arrêt des marchands de tous poils font les allers retours pour vendre nourriture, boissons et autres bricoles en scandant la promotion de leurs produits avec des voix incroyables.
Vendredi 7 novembre, six heures du matin, notre train entre en gare de Lucknow alors qu'un soleil rouge se lève dans la brume poussiéreuse. Des aigles survolent les toîts occupés par une armée de singes, tandis que de nombreux passagers se brossent les dents en bavardant aux quatre coins de la gare. Nous arrivons à poser nos vélos sans provoquer d'attroupement le temps de boire un réconfortant tchai, avant de filer vers le centre ville en quête d'un petit déjeuner et d'un hôtel pas trop cher…
Fanch : Lucknow sonne pour nous comme la fin du premier épisode Indien. C'est de cette ville que nous prendrons un train pour Calcutta d'où nous décollerons ensuite pour Kuala Lumpur. Mais d'ici là, notre emploi du temps s'annonce chargé. A commencer par le tournage du checkpoint 011 que vous avez peut-être déjà découvert. Un gros checkpoint qui n'a pas été évident à tourner, premièrement parce qu'il a fallut faire le tri dans ce que nous voulions raconter, montrer, deuxièmement parce qu'en Inde plus qu'ailleurs, il est difficile de trouver un lieu à la fois calme et exposé à la lumière du jour. Et comme le veut la tradition, c'est sur une autre terrasse, celle de notre petit hôtel devenu notre QG, à l'heure où les singes acrobates font leur première ronde que nous avons trouvé notre bonheur.
Geocyclab s'installe donc dans le quartier de la gare pour cinq jours de boulot. Mon compère s'enfonce dans le montage vidéo et ne sortira bientôt que pour profiter des douceurs culinaires que notre cantine élabore à chaque repas (ainsi va la vie du gros bosseur qu'il est). Ma mission consiste à trouver un endroit sûr où stocker la majeure partie de notre matériel jusqu'à fin décembre, de réserver les tickets de train (une affaire délicate puisqu'ils sont apparemment tous complets) et enfin, d'entretenir le contact avec Navin de Biji-Biji qui s'active déjà à Kuala Lumpur pour nous trouver le matos nécessaire à la future installation artistique.
Trois jours que nous sommes ici et nous avons bien avancé. Barth finalise le checkpoint et j'ai trouvé un couchsurfer qui accepte de garder les bécanes au chaud, nous l'avons brièvement rencontré ce soir dans sa maison-musée aux accents coloniaux prononcés. Birenda de son prénom, un personnage intéressant avec qui nous devrions passer plus de temps à notre retour. Reste cette histoire de train qui me met un peu la pression. Un problème qui va se résoudre la veille du départ après trois allers-retours à la station, quelques heures de queue et deux ou trois formulaires à remplir, nous embarquerons pour Kolkata le mercredi 12 novembre à 8H45, à bord du Doon Express. Ouf…
Entre temps, je me suis fait surprendre par une petite et douloureuse tourista qui me met KO pour 24 heures et qui durera jusqu'à… Et qui en fait est encore d'actualité quatre jours plus tard. Nous sommes en Inde rien de très surprenant là-dedans. Mais tout de même, le voyage en zone tropicale est physiquement éprouvant, surtout depuis l'épisode dengue (qui commence à dater) j'accumule les petites merdes de santé et je sens la fatigue qui s'accumule. Infection pulmonaire, indigestion, crève, infection non-identifiée autour des narines (probablement dûe à la poussière), mycoses, torticolis, tourista… Il y a des signes qui ne trompent pas, mon corps à besoin d'un petit break et le Népal va me faire le plus grand bien. Barth aussi à besoin de repos, il traîne une toux depuis trop longtemps, avec des hauts et des bas mais sans jamais se remettre complètement d'aplomb. Ceci dit, ne vous inquiétez pas, maintenant que nos vélos sont à l'abri, que le train est réservé et que le montage du checkpoint est achevé, le moral est bon… Il ne reste plus qu'une grosse mise à jour du carnet de bord d'ici notre arrivée à Kuala Lumpur et tout sera parfait !
Lucknow? Et bien nous n'en avons pas découvert grand chose si ce n'est le coin de la gare, ses singes et ses cerf-volants qui à l'heure du soleil couchant volent au-dessus des toits par centaines. Mais nous y reviendrons bientôt pour faire d'avantage connaissance et pour explorer un peu plus en profondeur les mystères de cette ville délaissée à tort (selon Birenda) par les touristes. Tant mieux pour nous ! Aller, on file, à bientôt Lucknow !